L’aventure débute en novembre 1976. Après avoir été marqué par le combat « Mohamed Ali vs Chuck Wepner » dont il s’inspire très largement, Sylvester Stallone fait naître sans le savoir « Rocky« , l’incarnation même du rêve américain, qui rapportera pas moins de 225 millions de dollars de recettes dans le monde. Et ce, en seulement vingt huit jours de tournage et avec un « petit » million de dollars de budget. Ce formidable succès planétaire engendrera cinq suites, dont un « Rocky Balboa » sorti en 2006 particulièrement réussi. Cet ultime épisode était supposé clore de la meilleure manière possible l’une des plus extraordinaires sagas dramatiques de ces dernières décennies. Mais c’était sans compter sur un Stallone qui, tout comme son double de cinéma, n’abandonne pas tant que la cloche n’a pas encore sonné.
L’histoire
Adonis Johnson est le fils illégitime du célèbre boxeur Apollo Creed, décédé avant sa naissance. Après une jeunesse tumultueuse où il fut balancé de foyers en maisons de correction, Adonis est recueilli par Mary Ann Creed, la veuve d’Apollo, en 1998. Des années plus tard, après des études réussies et une bonne éducation, le jeune homme décroche un poste important dans une grande entreprise financière. Mais il abandonne cette voie pour ne se consacrer qu’à la boxe, qu’il a dans la peau depuis l’enfance. Pourtant Adonis est sanguin, agressif. Il a du potentiel, mais il lui faut canaliser cette agressivité et apprendre. Il décide alors de se rendre à Philadelphie, pour demander de l’aide à Rocky Balboa.
Sorti de nulle part
« Creed : l’héritage de Rocky Balboa » est un film qui a bénéficié d’une promotion relativement discrète. Le projet a véritablement vu le jour en juillet 2013, mais jusqu’à sa sortie en salles, il n’y a eu autour du film que peu de communication. Il est ainsi toujours difficile d’être confiant vis à vis d’un projet aussi casse-gueule . Mon premier réflexe a été de me demander si Stallone arriverait un jour à faire le deuil de son personnage phare. Je n’étais pas du tout chaud au départ pour aller le voir en salle. Et puis, il y a eu un premier trailer, plutôt convaincant, puis un véritable consensus établi autour du film entre les critiques professionnels et même le public. J’ai alors décidé de changer mon fusil d’épaule. Et j’ai sacrément bien fait…
…Car « Creed » n’est rien de moins qu’une pure réussite. Sur tous les plans. Contre toutes attentes, il réunit en cent trente minutes toutes les qualités d’un bon Rocky, tout en parvenant à regarder dignement vers l’avenir. « Creed », c’est un peu « le vrai » Rocky 5. La relève, la vraie. Rocky abandonne ses toutes dernières forces à son poulain, et force l’admiration par sa capacité à jouer juste et sans forcer le trait, ainsi que par la facilité avec laquelle il se réapproprie Rocky et tout cet univers. Mickael B. Jordan assure le spectacle avec panache. Et il est aussi formidablement dirigé. Une grande richesse émotionnelle doublée d’une grande puissance de frappe émanent de « Creed », grâce à une mise en scène tantôt classique et sobre, tantôt ultra percutante lors des séquences de combat et de training montages.
Un pari très risqué… mais réussi !
Ce qui fait la force de « Creed », c’est le fait qu’il porte trois casquettes : c’est à la fois une suite de la saga Rocky, un spin off (puisqu’il se concentre sur un personnage qui n’est pas Rocky), mais aussi une relecture du premier film de 76. Souvenez-vous : dans le premier épisode, Rocky Balboa était choisi par Apollo Creed pour remettre son titre de champion du monde en jeu. Le but étant de se faire de la pub pour redorer son blason en donnant sa chance à un boxeur de troisième zone. De cette opportunité, Rocky sortira définitivement de l’ombre. Adonis, à sa manière, aura lui aussi cette chance… Dans ce nouvel opus, le passé omniprésent (grâce à ses nombreux caméos) embrase le présent et lui fait honneur, alternant drame et humour avec savoir faire. Il faut d’ailleurs noter que l’on doit ce travail remarquable à un certain Ryan Coogler, un jeune réalisateur de 29 ans qui a déjà collaboré avec Mickael B. Jordan (Adonis Creed).
Malgré quelques errances scénaristiques venant parfois ralentir le rythme, Creed offre un second souffle à Rocky en offrant une relève parfaite de l’ancien champion du monde des Lourds (version mi-Lourds, du coup). Grâce à un travail soigné et respectueux du matériau de base, le film s’adresse aussi bien aux fan boys qu’aux plus jeunes n’ayant pas vraiment connu la saga d’origine (même si on le savoure mieux en connaissant le background).
A la romance assez peu crédible, qui nait entre Adonis et sa petite amie Bianca, se superpose la relation géniale que le jeune homme entretient avec Rocky, qu’il appelle affectueusement « Tonton ». Personnellement -et là, je parle pour tous les trentenaires nostalgiques- j’ai vibré durant les séquences de combat et d’entraînement. Je me suis même parfois cru trente ans en arrière. Un conseil : ne ratez « Creed » sous aucun prétexte !